Au Père Tranquille, une expérience normande les pieds dans le sable

Je sais les paillotes traditionnelles de Corse sur la route des îles sanguinaires, alliant art de vivre et paysages de rêve, mais en Normandie je ne sais pas. Je sais les restaurants de plage mythiques de Pampelonne mariant nature, esprit chic et décontracté, synonymes de détente le jour et de fêtes branchées le soir venu, mais en Normandie je ne sais pas. Je sais les restaurants de plage de la côte basque permettant de déguster des tapas les pieds dans le sable, mais en Normandie, je ne sais pas. Je sais les beachs clubs d’Ibiza offrant des décors bohèmes de carte postale et une ambiance nocturne propre à cette île blanche mais en Normandie je ne sais pas. Du moins, je ne savais pas jusqu’à ce que je découvre cette adresse « Au père tranquille » sur la splendide côte de Nacre. J’ai vu cette petite cabane blanche sur la plage de Bernières sur mer ; j’ai rêvé que l’on s’y régale ; j’ai suivi les traces sur le sable. Et tel Rimbaud dans son Bateau ivre, moi qui pensais que les paillotes n’étaient que l’apanage du Sud, vrai, j’ai trop adoré ce petit coin paisible. O que j’aille à la mer et que je m’y régale les pieds dans le sable normand encore souvent !

Et dire que cette petite pépite, cet endroit parfaitement délicieux existe depuis 2008 ! Certes il n’est jamais trop tard mais que de temps perdu…

Au commencement de cette aventure, le hasard fit que le propriétaire, Grégory Baudron, flanant sur le littoral du Calvados avec un ami, tomba par hasard à cette époque nez à nez avec une modeste baraque à frites. O Fortuna ! Il y passa l’après-midi tant le spot était fantastique. Il savait que ce serait le lieu idéal pour un projet à venir, un lieu unique pour admirer le coucher du soleil.

C’est vrai qu’un restaurant de plage en Normandie peut paraître de prime abord quelque peu étonnant. Mais cette idée folle de concevoir une paillote chic et décontractée offrant une cuisine de produits frais de saison servie par un personnel aimable ne l’est finalement pas tant que ça. Sur le papier, tous les ingrédients sont en tout cas rassemblés pour faire de cette cabane face à la mer un lieu convivial que l’on n’a plus envie de quitter.

Dès que l’on franchit le petit portillon, un ailleurs vous saisit. Le sourire du personnel également. Charles avec sa décontraction et sa sympathie est assorti au décor. La décoration dans l’air du temps est soignée.

Ma première impression visuelle, avant même que je prenne place me conforte dans l’idée que mon repas va se transformer en une expérience mémorable. Pas besoin de luxe pour cela. Le luxe ici c’est la simplicité.

Tous les codes de la paillote sont au rendez-vous : le sable, les couleurs douces, les matériaux naturels comme le bois, le rotin ou les fibres végétales, la végétation, les accessoires simples et authentiques ou les parasols vintage. Finalement, pas besoin de partir sur un autre continent pour faire escale sur des plages paradisiaques.

L’important reste l’ambiance du lieu, relaxante, apaisante et cosy. Les tables sont ainsi posées pour que chacun ait l’impression d’être dans son petit endroit.

Que l’on soit face à la mer ou lové dans un recoin précieux avec vue sur les authentiques cabanes de plages, pas une place n’est enviée ni privilégiée. On est obligé de laisser ses valises de tourments au vestiaire dans un tel cadre tant l’ambiance maritime de la Manche à deux pas, offre un cadre pastel et relaxant, chatouillé par les embruns sauvages. Sénèque aurait pu déclarer officiellement ici sa « tranquillité de l’âme ».

La carte proposée par la femme de Gregory est aussi tranquille et simple que l’esprit du lieu et se décline sur des notes d’Italie. La cuisine est goûtue pour le plaisir de nos papilles. Pour ma part ce sera les emblématiques crevettes sautées, à la carte depuis toujours, en antipasti pour accompagner un bon verre de blanc bien frais. Mais on peut aussi se faire plaisir en partageant une assiette de charcuterie, une brusqueta, une focaccia, des calamars ou des samusas. C’est fou comme l’on voyage déjà à l’évocation de ces mets qui résonnent encore plus lorsque les rayons du soleil sont de la partie !

En plat principal, j’ai opté pour des Saint-Jacques snaquées et des spaghetti sauce toscane. Simple mais efficace. Mais le tartare de mes amis surplombé par une indécente burrata ou le carpaccio de bœuf dressé généreusement comme un soleil me faisaient de l’œil tant ils étaient, eux aussi, appétissants. Quoiqu’il en soit, que vous soyez plutôt pizza, pasta lover, pesci ou carni, tout est ici proposé pour vous plaire. Les produits sont frais et de saison. Entre deux bouchées délicieuses, il vous suffit de redresser la tête et d’apprécier le paysage dunaire pour prendre le temps de savourer ce petit instant béni du quotidien…

« De bons amis, une conscience tranquille, c’est la vie idéale »

nous confiait Mark Twain.

Je pense que Gregory ne m’en voudra pas d’user de cette expression délicieusement surranée pour qualifier son restaurant de « à la papa » mais je trouve que ce petit coin de plage est pensé ainsi ; c’est à dire que comme le suggère cette locution, tout est conçu et fait à la fois avec quiétude mais aussi grande application. Le service, la décoration, la composition des assiettes sont réalisées pour que le client vive une expérience simple, unique avec un souci du détail tant apprécié. Par définition « un père tranquille » est un homme qui tient à son confort et à sa quiétude mais c’est aussi une personne aimable, généreuse et accueillante. J’ai bien l’impression que je viens de définir le restaurant de Gregory…

Pour les plus sceptiques, pas d’inquiétude, en cas de mauvais temps ou d’un petit vent du large trop frisquet, on peut se retrancher sans souci dans la cabane où la décoration n’est pas moins apprêtée.

D’autant que le restaurant évolue avec la journée et les envies aussi. Le midi, ce spot est idéal en famille, permettant de profiter d’un repas qui s’éternise, le tout avec un œil attentif sur les enfants qui jouent dans le sable à quelques mètres. Le soir, on peut s’y retrouver entre amis ou en amoureux pour déguster un verre et faire prolonger le moment en égrenant la carte des plats à partager jusqu’à ce que soleil se couche sur une musique chill ou un DJset plus dansant. Certes, nous ne sommes pas à Ibiza au Sunset Ashram à l’extrémité de la plage de Cala Conta pour admirer le merveilleux sunset ibérique mais il paraît, et c’est l’une des nombreuses raisons qui me poussent à revenir ici, que le coucher du soleil à Bernières n’a rien à lui envier !

Bref, vous l’aurez compris, je suis tombée littéralement amoureuse de ce restaurant de plage normand saisonnier et je ne remercierais jamais assez mon amie Laurence Du Tilly de m’avoir dévoiler son secret en partageant son adresse préférée.

Ici, on se sent bien et on perçoit aisément que le personnel essaie d’être « sérieux sans se prendre au sérieux » et je crois que c’est la formule magique idéale pour que le client se sente à l’aise et profite inlassablement de l’expérience multisensorielle qu’il est en train de vivre.

Je lève donc mon verre à la gloire de ce père si tranquille qui a osé faire fi du chant des cigales et du parfum des lavandes pour imaginer un lieu de rêve à la Cale du Platon à Bernières sur Mer, une paillote normande aussi accueillante qu’unique.

« Courons vers l’horizon, il est tard, courons vite,

pour attraper au moins un oblique rayon ! »

comme Rimbaud depuis la terrasse du fameux Père tranquille…

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